Le Club des Aéronautes Intemporels Réunis
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 Journal de Jim - Carnet de Bord - Chap. 16 à 18

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Capt.Jim
J'ai laissé le Vent du Soir Décider
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   Posté le 22-02-2006 à 06:31:35   Voir le profil de Capt.Jim (Offline)   Répondre à ce message   http://www.myspace.com/jimrihet   Envoyer un message privé à Capt.Jim   

Comme a l' époque d' un Exil, 2 semaines entières passées à regarder la pluie, les pluies, tomber sur la terre et l' a colorer de rouge, cette Terre, cette terre volcanique.

Des rideaux de flotte, toujours et encore.

- 16 -


Au travers des bambous tressés, je regardais les arbres d' en haut.

J' avais alors dégotté une cabane surprenante, un véritable Rêve de gosse : un truc suspendu dans les branches, une plate forme aromatique qui chopait toutes les odeurs des jungles et me les rebalancait , plus haut, en nuages de vapeur.

C' était venu d' un coup : vers les quinze heures de l' après midi la bande d' horizon s' était grossie soudain, noircie ensuite très vite, puis se mit à AVANCER vers l' île.
Je notais le silence qui m' entourait, brutalement, comme on s' apperçoit dans un sursaut qu' on a perdu quelque chose.
Pas un cri d' animal, pas même l' appel d' un oiseau coloré, la jungle s' était figée, et la végétation abracadabrante me parut comme assombrie. Je discernais moins bien les dégradés de vert, les troncs, les racines gigantesques, tout ce fatras végétal rassemblé sur la palette qu' un peintre à l' humeur changeante, venait d' assombrir.

- Ino !!! Ino !!!

Je vis un groupe de gamins dévaler la ravine, une centaine de mètres plus loin. Petite troupe bondissante d' où emergeaient de temps à autre une tête, un bras, une tache de couleur, une silhouette fugace, et d' entre les rires et les cris ponctuant cette course innocente, j' entendis ce mot : Ino !!!! Ino !!!!!

Comme si la plus grosse branche du coin s' était rompue, un bruit, un seul, traversa l' espace, enveloppant soudain la totalité des lieux.
Je quittais du regard les petits villageois qui remontaient alors le sentier du village, pour contourner la minuscule plate forme que j' appelais "le Balcon".
J' agrippais à m' en faire mal les tresses qui longeaient la cabane et en faisaient le tour, me séparant du vide. Perché sur mon Royaume de ficelle et de bambous, dans cette altitude que j' ai toujours cherché, ce que je vis venir alors, face à l' océan, reste un moment innoubliable, beau et terrifiant.

La mer s' était changée.
Plus une trace de bleu.
Ce bleu-vert emeraude, qui semble flotter à la surface des lagons, et dessine en pastels ses profondeurs secrêtes.
Perdus aussi, le reflet des nuages que je scrutais souvent à en mouiller la vue, tant ce miroir liquide restitue les couleurs.
Noire, avec de temps à autre de vifs traits d' ivoire, comme des dents monstrueuses à effrayer le ciel, la mer semblait gonflée d' une puissance démesurée, aussi effrayante que soudaine.

Puis comme engloutit, le paysage entier céda, comme on se rend, comme on abandonne.
Je le vis à la manière dont les arbres se couchèrent, balayés en quelques secondes par l' eau du ciel.
Des vagues se formaient devant mes yeux, des averses en cascades dégringolaient, bousculées par les bourrasques continues.
Des vagues de pluies.

Je me laissais glisser le dos contre ma cabane, jusqu' à me retrouver a demi-allongé sur les planches disjointes du sol de la plate forme.
Je ne pouvais détacher mes yeux plissés dans les embruns, de cette masse sombre qui grondait devant moi ; respirant difficilement l' air chargé de sable, je contemplais comme nu, dépossédé de tout, ce pouvoir extraordinaire, cette force naturelle, et pourtant ... rassurante.

Ino : l' orage.


- 17-



- HEY ! Come on ! Heey !!
Elle me secoua le bras vigoureusement.

Ses longs cheveux balayaient son visage, me giflant aussi dans cette folie, dans tout ce déchaînement.
Elle agrippait mes mains, de ces doigts longs et fins, en me criant à l' oreille des mots que le vent emporta.
La seule pensée qui me traversa l' esprit dans ces secondes suspendues, accrochés tout les deux comme sur le toit du Monde, c' était qu' en ce moment précis, ouais, je pouvais mourir : c' était un BON jour pour mourir.

- C' mon !!!! JiiiiiiM !!!! Come On !!!!

On s' était recroquevillés l' un contre l' autre, puis comme soudés au bois de ce curieux plancher, il fallut ramper et ramper encore, sous des trombes de pluie qui s' abattaient sans cesse, pour gagner l' intérieur de la cabane-dans-les-airs.

Je ne connaissais de l' orage sous ces latitudes, que les fameuses turbulences que les pilotes croisent sous la troposphère : j'ai eu depuis l' occasion d' en parler avec West', pilote expérimenté à ces climats changeants.

Il m' a dit :

- tu vois Captain Jim, c' est comme les feux follets.
C' est des éclairs qui tournent autour de la carlingue, tu les SENS.
Au bout du manche ils font comme des Crrrrr....crrrrr..... tu vois ?
ils crépitent.
Et ils te lâchent pas.
ils passent comme un ruban devant ton nez à 2 kilomètres et tu t' apperçois qu' ils finissent juste sous tes saumons d' aile : ils t' entourent.
Et 'pis pffffft ... Plus rien : ils se barrent.

West', invariablement, renversait sa bière en accompagnant les turbulences qui se barraient d' un grand geste circulaire qui déclanchait des gueulantes de la part des buveurs attablés, et provoquait chez moi
une furieuse envie de "voir ça".

Mais c' était loin d' ici, dans les bouges sordides d' Oahu downtown ....
Et bien après cette après midi là, sur les hauteurs mouvementées de ma cabane suspendue....

On avait réussi à se trainer jusqu' à l' intèrieur.
Elle et la souplesse de ses vingt ans, moi et ma carlingue froissé. Mais j' ai toujours ramené à bon port les trucs lourds et fatigués, y compris mon âme meurtrie et ce corps usé.

J' ai eu un mal de chien à laisser cette vision derrière moi, cette vision d' apocalypse.
A détacher mon regard de cette intense présence, comme entouré de vie. Dans le vacarme, encore une fois : dans cette folie.

- My poor little boy....

Quand elle me disait ça, chez moi c' était automatique : ça réveillait une flamme, une etincelle particulière que tous les ouragans de la planète n' auraient réussi à éteindre...
C' était peut être dans la manière que sa bouche prononcait ces mots -'sais pas- ou alors dans ses yeux, déjà des yeux de mère ? Mais elle aurait pû être ma fille que ça n' en changeait rien : j' arrivais à cet âge cruel, où la somme des désillusions, ces diallèles du corps et de l' esprit se confondent tels des songes pour enflammer encore, et côute que côute, ce qui nous reste à vivre...

J' ai jamais su comment la cabane avait tenu le coup.
Comment on s' était retrouvé, hagards et groggy, entre les murs de bois qui tenaient bon, arrimés à un arbre centenaire, sûrement. Mais je vis dans ses yeux de chat toute la confiance et la sérénité que son peuple, generation après generation, léguait en héritage à ses enfants : cette sûreté dans le danger.
Et cette Confiance, bordel, toute cette confiance dans le temps à venir....

-18-


En se glissant le long de mes doigts, sa robe se retrouva suspendue quelques instants dans l' espace, retenue par la pointe des seins.
Elle avait ce grain de peau qu' un homme n' oublie jamais, comme un sable doux et granuleux à la fois, une peau faite pour la caresse d' une main, l' humidité tiède d' un sexe.
Trempés, échappés à cette pluie violente, nos corps recherchaient une humidité partagée, cette liquidité commune aux amants mélangés.

J' avais pour ce corps frêle de femme-enfant, l' attention et la Quête d' un homme comme hors du temps : aucun repère, aucune marque, rien à suivre, juste prendre ce que l' existence offre de plus beau : l' innocence d' un instant partagé.
Prendre ce cadeau de la Vie à celui qui s' approche de sa fin.

Au dehors l' orage galopait vers d' autres régions de l' île, laissant derrière lui le début de la saison des pluies, et deux êtres épargnés par les saisons de la vie : un pilote fatigué et une femme amoureuse.

Nous roulâmes ensemble, comme ces vagues de fond, quand le mouvement de l' un fait partie du mouvement de l' autre : dans cet Elan sublime où les corps ne font qu' un, dans ces râles étouffés dans les cheveux mêlés, dans les doigts qui se serrent sur des promesses non-dites.
Avant de venir en Elle, j' eu envie de lui dire, de cette manière stupide que les hommes parfois ressentent, quand toute la beauté d' une femme éclabousse soudain l' obscurité d' un instant, quand l' avenir même d' une vie se résume à une note, à une effluve de parfum, j' ai ressenti ce besoin de lui dire que je l' aimais.

Deux jours plus tard je l' épousais.


- 18 -



C' est un petit cimetière à l' abri des Vents.

On y arrive par un sentier qui serpente le long du flanc de la colline, avec à chaque avancée vers la crête, des parfums mêlés de jasmin et de manguiers sauvages.
Au sommet de la butte, une barrière de cyprès entoure une clairière éclatante de soleil, avec des taches brunes que laissent autour d' eux des arbres centenaires qui n' ont plus peur de rien.

C' est un endroit d' où on domine la vallée, des montagnes à l' est et puis une autre vallée qui descend vers le sud... plus loin un village à la blancheur aveuglante se dispute la lumière avec un bout de ciel. Puis au delà encore, c' est Pearl et sa grisaille...

Il y a un point d' eau, une source qui emerge entre deux gros rochers d' où s' écoule une eau claire, à la fraicheur étonnante.
Ce filet d' eau s' entend à l' autre bout du lieu, il est forme de Vie dans cet endroit de mort, cet endroit où jamais je ne retournerais, ou peut etre un jour, poussé par une fièvre, ou bien juste avant que de tomber du Ciel, juste avant de rejoindre tout mes amis crashés, j' irais lui dire "je t' aime', comme par un jour d' orage...

Ino ..... l' orage.


Kauaï island,
22 / 02 1951


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Un Jour, je suis parti....
MadBran
Nerzh hag enor!
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MadBran
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   Posté le 22-02-2006 à 10:32:07   Voir le profil de MadBran (Offline)   Répondre à ce message   Envoyer un message privé à MadBran   

(...)


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Mémoire de Kadoc, Livre II, Verset 10:
"Pour connaitre le sens du vent, faut mettre un doigts dans l'cul du coq..."
West
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West
1368 messages postés
   Posté le 22-02-2006 à 20:21:44   Voir le profil de West (Offline)   Répondre à ce message   Envoyer un message privé à West   

vu


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L étoile te guide et le vent emméne sur la piste ,



fabb57
l'union fait la force
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fabb57
1169 messages postés
   Posté le 23-02-2006 à 12:07:33   Voir le profil de fabb57 (Offline)   Répondre à ce message   Envoyer un message privé à fabb57   

Ouahhh...... , architecte, écrivain, t' es doué Jim, faut que tu rassembles tout ça un jour pour en faire un livre,que tu nous dédicaceras, merci d' avance...


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bloodice
FATALEMENT
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bloodice
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   Posté le 23-02-2006 à 17:11:11   Voir le profil de bloodice (Offline)   Répondre à ce message   Envoyer un message privé à bloodice   

Je lui est deja dit !!!!!
Mais il n'en fait qu'a sa tete ....


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KAWAI !!!!! J'aime ces pilotes !!!!!

Capt.Jim
J'ai laissé le Vent du Soir Décider
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   Posté le 23-02-2006 à 20:53:04   Voir le profil de Capt.Jim (Offline)   Répondre à ce message   http://www.myspace.com/jimrihet   Envoyer un message privé à Capt.Jim   

....heureusement


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Un Jour, je suis parti....
bloodice
FATALEMENT
nouveau membre
bloodice
3799 messages postés
   Posté le 24-02-2006 à 17:50:11   Voir le profil de bloodice (Offline)   Répondre à ce message   Envoyer un message privé à bloodice   

Ben non pourquoi !!!!
c'est vraiment super cool ce que relate de nos mission et des evenement qui si déroule !!!!


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KAWAI !!!!! J'aime ces pilotes !!!!!

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